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Faut-il investir dans les résidences pour seniors ?

Précédées d'une mauvaise réputation, les résidences pour seniors se font une nouvelle jeunesse

Le parisien Économie 10 mars 2014

Patrimoine

Les taux de rentabilité annoncés sont importants. Une bonne formule pour l’investisseur… à condition de savoir choisir le bien, de veiller à la rédaction du bail et de trouver le bon gestionnaire.

Les résidences pour seniors n’ont pas toujours eu bonne réputation

Frais de gestion, coût des charges et des services, problèmes de revente… Après un boum de construction dans les années 1980-1990, les résidences pour les seniors n’ont pas toujours eu bonne réputation. Les personnes âgées qui investissaient leurs économies pour se loger dans ces copropriétés leur offrant en sus d’un toit, une foule de services mais aussi confort et sécurité, ont souvent déchanté.

Or, cette ère serait aujourd’hui révolue, selon les gestionnaires des résidences pour seniors « nouvelle génération ». « Il y a encore une dizaine d’années, les propriétaires étaient leurs propres exploitants via des syndics de copropriétaires, explique François Georges, président du Syndicat national des résidences avec services pour aînés (SNRA). Ce système a vécu. Il est aujourd’hui beaucoup plus sain, et plus proche de ce qui existait déjà dans les résidences de tourisme ou étudiantes. »

Selon le cabinet d’études Xerfi Precepta et le SNRA, les plus de 60 ans représenteront 35 % de la population française en 2050 et les plus de 75 ans seront près de 12 millions en 2050, contre 5,5 millions actuellement. « La France compte aujourd’hui 374 résidences pour seniors (valides et indépendants) soit environ 32 000 logements, ajoute François Georges. Fin 2015, on atteindra les 580 résidences et la barre des 1000 sera passée en 2020. » Sans compter les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), 6 à 7 fois plus nombreux. Bref, les besoins sont réels et le marché existe.

Un bail commercial avec un exploitant qui gère tout

En outre, les promesses de rendement sont attractives : 4,2 à 4,5 % en moyenne. Idéal a priori pour se constituer un complément de revenus pour la retraite. Avantage de cette formule, puisque ces résidences sont gérées via des baux commerciaux et non plus comme des copropriétés, les propriétaires signent un bail commercial avec un exploitant qui paie et gère absolument tout. « Les Steva, Orphéa, Jardins d’Arcadie ou Médica ont à charge de trouver des locataires ou à défaut de verser les loyers aux propriétaires des biens, mais aussi de recruter et gérer le personnel, de payer les charges, d’assumer les travaux d’entretien, explique Sandrine Genet, conseillère en gestion de patrimoine et fondatrice du site Monprojetretraite.fr. Résultat, à condition d’investir dans les Ephad ou dans les résidences seniors à très long terme, sans jamais avoir pour objectif d’habiter le bien, c’est une bonne opération, dans un cadre fiscal attractif. » Le régime bénéficie également d’une fiscalité incitative par le biais du statut de loueur en meublé non professionnel (lire l’avis d’expert ci-dessous). « Mais attention, prévient maître Paul Duvaux, avocat spécialiste en droit fiscal. Ces placements sont des montages compliqués et devraient rester des placements de diversification minoritaires dans le portefeuille des investisseurs. Ils peuvent être très risqués, notamment si le gestionnaire professionnel est défaillant. Ils ne devraient pas être financés par des prêts bancaires sur 15 ans alors que la durée du bail commercial est de 9 ans avec résiliation de l’exploitant possible tous les 3 ans. Il faut enfin savoir que si les conseillers en gestion de patrimoine sont si prompts à les proposer c’est parce qu’ils perçoivent entre 5 et 10 % des prix de vente des biens de la part des promoteurs. » L’avis objectif d’un expert-comptable (qui vérifiera notamment le prévisionnel d’exploitation et le sérieux de la rentabilité annoncée) est donc indispensable avant de se lancer !

Cinq conseils
pour bien investir

1. Ehpad ou résidences seniors classiques ?

Les Ehpad accueillent des personnes âgées souvent dépendantes et qui ont besoin de soins médicaux. Investir dans ces structures revient à acheter une chambre d’hôpital. Ce qui importe ici n’est pas forcément la localisation de la structure mais sa bonne conformité aux normes sanitaires et sociales ou la qualité des services proposés aux résidents. « Les chambres en Ehpad rapportent en moyenne entre 70 et 90 euros de loyer par jour et sont 10 à 20 % plus rentables que les résidences seniors », explique Olivier Trit, directeur chez Cerenicimo. De leur côté, les « résidences services pour seniors » s’adressent au contraire à des personnes indépendantes qui souhaitent vivre en centre-ville, à proximité des commerces, services et transports. L’emplacement est cette fois primordial. Mieux vaut donc (même si le projet est vendu en état futur d’achèvement) se déplacer et aller voir si la résidence est susceptible d’attirer des locataires. Enfin, quelle que soit la nature de la structure, mieux vaut toujours investir dans des programmes comprenant entre 80 et 100 chambres, qui permettront à l’exploitant de supporter la mise en place de services coûteux.

2. Choisir le bon gestionnaire

Le principe de la location meublée gérée veut que le gestionnaire de la résidence verse quoi qu’il arrive des loyers au propriétaire du bien. Et ce, que l’appartement ou la chambre soit loué ou non. Avant d’investir dans une résidence pour seniors mieux vaut donc vérifier quelle est la réputation, le sérieux et le professionnalisme du futur gestionnaire/exploitant en visitant d’autres résidences de son portefeuille, en vérifiant sa solvabilité (ou celle du groupe dont il émane), en se renseignant sur ses capacités à trouver des résidents, à gérer le personnel, entretenir les locaux. Les exploitants les plus gros et les plus connus, qui ont pignon sur rue et gèrent de nombreux projets sont souvent les plus fiables…

3. Vérifier la rentabilité 

La rentabilité moyenne annoncée des investissements réalisés dans les résidences seniors est d’environ 4,2 à 4,5 % par an. Certains programmes affichent des rentabilités record à plus de 5 %… Méfiance. Une rentabilité trop alléchante ne sera pas toujours tenable par le gestionnaire qui risque alors d’imposer une baisse des loyers, ce qui peut avoir des conséquences catastrophiques pour les investisseurs qui souscrivent des prêts. Mieux vaut donc investir dans des produits solides avec une rentabilité moyenne stable et pérenne. « Il ne faut pas hésiter à demander un prévisionnel d’exploitation au futur gestionnaire et à le soumettre à un expert-comptable indépendant qui vérifiera si la rentabilité est sérieuse et surtout nette de charges et de taxes », explique Paul Duvaux, avocat spécialiste en droit fiscal.

4. Bien rédiger le bail 

L’investisseur doit sécuriser son bail commercial au maximum en demandant par exemple dans une clause spécifique à l’exploitant de renoncer à sa possibilité de résilier le bail tous les 3 ans. En lui demandant également de prendre en charge tous les travaux aussi bien d’entretien que de réparations ou même les gros travaux de remise aux normes. Préciser également qui paye quoi : renouvellement du mobilier endommagé, assurances, etc. Vérifier le montant des pénalités dues par le propriétaire en cas de revente ou de sortie anticipée du bail. Si le bail est bien rédigé et bien négocié, le propriétaire investisseur n’a donc à payer que la taxe foncière qui représente environ 1 à 2 mois maximum de loyer.

5. Comparer les prix

La valeur des chambres en Ehpad dépend surtout de la qualité des services et de l’autorisation d’ouverture délivrée par la Direction des affaires sanitaires et sociales. Pour bien comparer les prix de vente au mètre carré, mieux vaut donc se référer aux tarifs d’opérations similaires proposés chez les concurrents. Rien n’empêche de comparer les prix de vente au mètre carré des résidences services non médicalisées avec les prix HT de l’immobilier neuf classique. Ex. : À Levallois-Perret, le mètre carré dans une résidence Steva coûte actuellement autour de 8 000 euros (contre environ 8 500 euros dans l’immobilier classique selon Efficity) et 3 900 euros le mètre carré pour une résidence Domusvi située à la Londe-les-Maures (Var) (contre 4 000 euros en moyenne).

avis d’expert
Vincent CHAUVEAU
Notaire délégué à l’Institut notarial du droit de l’immobilier

Les résidences pour seniors sont-elles de bons investissements ?

Vincent CHAUVEAU : Ce sont des produits qui génèrent des revenus (les loyers) et de la défiscalisation. Face au vieillissement de la population et à la demande croissante de solutions, le recours aux fonds privés pour permettre de construire des résidences de services est une alternative au financement de structures publiques. L’État a donc inventé des dispositifs fiscaux très incitatifs pour les investisseurs privés, comme le statut de loueur meublé non professionnel (LMNP) ou l’amendement Censi-Bouvard.

« Ces produits génèrent des loyers et de la défiscalisation »

Quels sont les avantages de ces dispositifs ?

Vincent CHAUVEAU : Avec le statut LMNP, les revenus issus de la location du bien relèvent des BIC (bénéfices industriels et commerciaux). L’intégralité des charges (intérêts d’emprunt, taxe foncière) est donc déductible, mais le propriétaire peut surtout amortir son bien. C’est-à-dire qu’il peut déduire de ses revenus locatifs ce que lui « coûte » chaque année son bien immobilier mais aussi une part de la valeur des meubles qui équipent le bien. Et si les dépenses excèdent les recettes, le propriétaire dégage un amortissement réputé différé (ARD) reportable pendant 10 ans. Attention, les revenus fonciers ne doivent cependant pas dépasser 23 000 euros par an ou toujours représenter moins de 50 % des revenus globaux, faute de quoi le propriétaire devient loueur professionnel. Le Censi-Bouvard accorde quant à lui une réduction d’impôt sur le revenu de 11 % du prix HT d’achat du bien (neuf ou en état futur d’achèvement) dans la limite de 300 000 euros. Enfin, ils permettent l’un et l’autre de récupérer la TVA à 20 %.

Et les inconvénients de cette forme d’investissement ?

Vincent CHAUVEAU : Attention à la décote. Ces opérations permettent de générer des revenus, plus que de la plus-value. Ils sont rentables tant qu’on les loue. Mais à la revente, c’est un marché encore peu connu. Et on investit surtout dans un bien qu’on n’occupera jamais… Alors qu’on sait que dans les années à venir la demande sera de plus en plus forte, il n’existe aucun droit prioritaire pour les acquéreurs de biens à destination des personnes âgées. S’il existait, ce droit permettrait de valoriser fortement ces biens très spécifiques. Enfin, une piste pour limiter les risques de ces opérations est à mon sens sous-exploitée : la vente en démembrement de propriété. L’investisseur achète de la nue-propriété et en laisse l’usufruit au gestionnaire pendant 15 ans. Il ne touche alors aucun loyer, mais il achète un bien décoté qui prendra toute sa valeur à l’extinction de l’usufruit temporaire. Cela existe déjà dans le logement social…

En savoir +

À LIRE
Les nouvelles règles de la location meublée pour réduire ses impôts : Le point complet sur les nouveaux dispositifs, Jean Louis Le Boulc’h, éd. Maxima, mai 2013, 213 pages. 28,80 euros.
La location meublée, Vinson Gérard, éd. Gualino, juillet 2013, 192 pages. 21 euros.

À CONSULTER
Pour tout savoir sur la déclaration des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC), les LMNP et le dispositif Censi-Bouvard : www.impots.gouv.fr
Pour faire une simulation de revenus, trouver des solutions pour compléter ses revenus, investir, placer son argent :https://www.monprojetretraite.fr
Le site de l’association française des conseillers en gestion de patrimoine certifiés, pour trouver le bon conseil : www.cgpc.fr

Y ALLER
Au salon des seniors qui aura lieu du 3 avril au 6 avril à Paris Porte de Versailles : entrée gratuite à télécharger sur www.salondesseniors.com.